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Formatrice, fédératrice, familière, forte, franche… Les mots ont manqué pour qualifier Madame Diop. L’Ucad a rendu un hommage mérité à Bajen qui s’est illustrée 34 ans durant par son humanisme et sa constance.   

  

S’il est encore nécessaire de donner à la jeunesse une leçon de constance, Madame Diop, Fatim Ba peut largement servir de référence. Partie à la retraite en septembre dernier, celle que l’on appelle affectueusement Bajen au rectorat a servi pendant plus de 30 ans à la même direction, au même poste, sans discontinuité.   

Arrivée à l’Université Cheikh Anta Diop le 7 mars 1988 sous l’ère Souleymane Niang, elle est affectée à la direction des finances et de la comptabilité qu’elle considère comme le cœur de l’université. Elle a alors en charge les remboursements des frais médicaux.   

34 ans après, à l’heure du départ à la retraite, son premier poste est resté le même, toujours au bureau numéro 20 où elle a fait ses pas dans le monde professionnel. Cette longévité fait qu’elle est bien connue des laboratoires d’analyse et autres cliniques et hôpitaux. Beaucoup de travailleurs de l’Ucad ont pu d’ailleurs bénéficier de faveurs dans ces structures grâce à son entregent. La République ne s’y est pas trompée en lui décernant, le 21 mars 2017, le grade de Chevalier de l’ordre du Mérite pour service rendu à l’Ucad.  

Aujourd’hui, Bajen retient une chose : la chaleur humaine. « J’ai eu des relations cordiales avec tout le monde. Dans toutes les facultés, si vous demandez Fatim Diop, on me connaît », se félicite celle qui se souviendra sans doute de la solidarité et du club de thé à la DFC.   

Les témoignages émouvants 

Les agents du rectorat l’ont bien compris, eux qui ont tenu à lui rendre un hommage mérité, samedi dernier, devant sa famille avant son départ. A cette occasion, les témoignages ont été unanimes sur ses qualités humaines. ‘’Tata Fatim’’, ‘’ma maman’’, ‘’mère nandité’’ ont été des mots qui témoignent à suffisance de ses relations.   

Le Directeur des Affaires pédagogiques, représentant du recteur, les a résumés avec la lettre ‘’F’’.  « Mme Diop a formé beaucoup de monde, elle est donc une formatrice. Elle est aussi fédératrice, familière, forte et franche », déclare Kharouna Talla.   

Durant plus de 3 décennies, elle a vu des personnes de différents tempéraments. Mais elle a toujours su gérer, consciente du fait que son poste est éminemment social. « Certains venaient fatigués. J’essayais toujours de discuter, de rassurer, de consoler. »   

C’est d’ailleurs le viatique qu’elle veut laisser à la jeunesse avant d’aller profiter d’un repos bien mérité auprès des siens. « Dans toute chose, l’accueil joue un rôle important. Il faut savoir parler aux gens », conseille-t-elle.  

L’année blanche de 1988 

Si Madame Diop a fait carrière à l’Université, c’est que le destin l’a voulu ainsi, lui qui change très souvent les plans de départ. Originaire du Fouta, Fatim Ba est née à Kaolack suite à une affectation de son père venu de Gamadji Saaré. La petite fait ses études primaires à l’école Sara Ndiougary. Après le bac en 1987, l’ancienne élève du lycée Waldiodio Ndiaye débarque à Dakar.  

Dans les premiers jours, les os de la Kaolackoise, habituée à une forte chaleur, seront pleinement mordus par la fraicheur dakaroise. C’est d’ailleurs un des souvenirs marquants de son premier séjour à la capitale. Heureusement pour elle, la température sera contrebalancée par une chaleur fraternelle qu’elle retrouve chez sa grande sœur à Sicap Liberté. L’intégration se fera ensuite sans souci, puisque les réflexes d’un citadin étaient bien ancrés chez l’enfant du Saloum.  

A Dakar, Fatim Ba devait suivre une formation en finance. Mais un contexte politique particulier va mettre un coup de frein à ses études. En 1988, le Sénégal connaît une année blanche suite à des tensions postélectorales. Elle arrête ses études et parvient à trouver un poste à Attijariwafa bank, actuelle Cbao. Un poste qu’elle n’a jamais occupé. « La tension en ville était telle que je n’arrivais pas à accéder au bureau », se souvient-elle.   

La rigueur d’un père et le militantisme clandestin 

Elle finit par renoncer après avoir trouvé une place à l’université de Dakar. A l’époque, les salaires étaient particulièrement bas dans cette institution. C’est pourquoi d’ailleurs Bajen éprouve un certain respect à l’égard des leaders syndicaux qui ont été à la pointe de la revendication pour une revalorisation salariale.   

Fille d’un inspecteur de police, Fatim Ba connait ce qu’est une éducation rigoureuse, sans la moindre concession. « Mon père était très dur. À la maison, c’est comme dans un camp militaire. Dès qu’on entend son véhicule, on se passe l’information. C’est le silence total. »   

Ironie du sort, le père intraitable verra sa maison devenir un lieu de contestation du pouvoir en place. Ses enfants sont membres de And Jëf clandestin. Parmi eux, un dirigeant du mouvement étudiant qui sera enrôlé de force dans l’armée par le pouvoir de Senghor.  

C’est dans cette ambiance que l’adolescente va subir l’influence politique de ses grands frères. « Nous avions investi le mouvement navétane pour véhiculer des idées dans les ASC. J’étais aussi chanteuse dans le groupe Caada-ji. C’est cette formation qui me facilite partout mon intégration. » Une intégration si parfaitement réussie à l’Ucad que Bajen manque déjà à la communauté.   

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